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Adrien Delvoye

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PRÉSENTATION

Archéologue de formation spécialisé en céramologie, mes recherches portent plus particulièrement sur les sociétés d’Afrique de l’Ouest à l’Holocène récent. Familier des contextes funéraires et mégalithiques grâce à près de 10 années de fouilles archéologiques sur la nécropole UNESCO de Wanar (Sénégal), mon travail interroge l’évolution des productions céramiques sur le temps long par l’étude de leurs caractères typologiques et technologiques. Depuis 2019, ma réflexion s’étend aux sociétés modernes et contemporaines à travers une approche ethno-archéologique conduite dans les régions centrales du Sénégal et de Gambie, et une collaboration à des travaux menés au Sénégal oriental.

Mon travail explore aussi les formes et les modes d’organisation des habitats, les moyens de subsistance et les artisanats des sociétés anciennes à travers plusieurs projets en Afrique de l’ouest, depuis la bande soudano-sahelienne (Sénégal, Gambie) jusqu’aux espaces tropicaux du Golfe de Guinée (Bénin) (voir ci-dessous). Confrontés à l’Histoire de chacune des régions étudiées, les vestiges céramiques et les autres témoins de la culture matérielle sont ici de précieux supports pour appréhender les dynamiques culturelles des sociétés ouest-africaines au cours de la période médiévale, la période Atlantique et moderne, jusqu’à aujourd’hui.


SÉNÉGAL ET GAMBIE

Projet HOME : “HOusing in the Margins of Empires: Archaeology and Ethnohistory of settlements in the megalithic region of Senegal and The Gambia“ (2023-2027).

(FNS Ambizione PZ00P1_216186 ; Requérant : Adrien Delvoye)

Le projet HOME (2023-2027) vise à rassembler les premières données archéologiques et ethnohistoriques de référence sur habitats et contextes domestiques des régions centrales du Sénégal et de Gambie ; dans une région qui fut jusqu’ici principalement étudié pour ses sites funéraires mégalithiques érigés au tournant des 1er et 2e millénaires CE.
Malgré quelques données collectées ces dernières décennies, l’étude des modes de vie et d’occupation des territoires par les populations anciennes reste toutefois très lacunaire en Sénégambie. Des aspects aussi centraux que la nature des habitats (formes, matériaux, techniques de construction), les modes de subsistance (ressources végétales et animales) et la culture matérielle de ces sociétés restent encore largement inconnues.

L’objectif du projet HOME est d’interroger ces différentes thématiques à travers une approche interdisciplinaire, à la croisée des Sciences humaines et sociales (archéologie, histoire) et des Sciences naturelles (archéobotanique, archéozoologie, géoarchéologie, géomorphologie, pétrographie céramique). Il s’articule autour d’un volet archéologique (prospections, tranchées diagnostics, fouilles extensives) permettant l’acquisition de données inédites sur les sociétés anciennes, et un volet ethnohistorique (sources écrites arabes et européennes, archives photographiques, sources ethnographiques) autorisant de premiers essais de reconstitution des dynamiques culturelles sur le long terme.

 

Projet “Poteries d’hier et d’aujjourd’hui : Transmission des savoir-faire techniques et évolution des fonctions céramiques entre Sénégal et Gambie aux Ier et IIe millénaires de notre ère“ (2019-2022).

(Allocation post-doctorale de la Fondation Fyssen, en anthropologie sociale)

Support matériel privilégié de l’anthropologie des techniques et de l’ethnoarchéologie, la poterie est un artisanat encore actif dans de nombreuses régions d’Afrique, comme au Sénégal et en Gambie. Dans ces deux pays, la poterie constitue également un marqueur chronologique incontournable des sites funéraires mégalithiques (8e - 16e s. AD) et un témoin privilégié des savoir-faire anciens. D’hier à aujourd’hui, nos connaissances sur les productions domestiques de cette région restent néanmoins très lacunaires.

Cette recherche postdoctorale souhaite pallier cette lacune en explorant la diversité des traditions céramiques actuelles des régions centrales du Sénégal et de Gambie, par des enquêtes conduites auprès de potières de différentes communautés (Wolof, Malinké, Sarakolé). Reliée au contexte socio-économique de la production, cette ouverture à l’ethnographie questionne autant les modes de transmission des connaissances, la variabilité des chaînes opératoires de fabrication, les modes de consommation ou les rapports entre techniques et identités.

Entre archéologie et ethnographie, ce travail illustre comment les données relatives aux cultures matérielles anciennes et actuelles peuvent s’articuler pour déboucher sur des interprétations d’ordres historiques et anthropologiques. Grâce au concept de chaîne opératoire, l’étude d’un artisanat comme la céramique devient ainsi un vecteur d’information privilégié pour décrire l’évolution des sociétés. Pour la première fois dans la région, une concordance peut ainsi être établie entre la distribution de certains traits techniques et l’emprise d’anciens royaumes remontant parfois au 13e siècle. Dans les régions centrales du Sénégal et de Gambie, les traditions céramiques actuelles se différencient principalement par les techniques d’ébauchage employées : l’aplanissement au poing d’une part, et le moulage sur forme convexe d’autre part. Or, ces deux techniques s’inscrivent dans des espaces géographiques et culturels distincts, séparés par le fleuve Gambie. La première est reliée à une zone aujourd’hui majoritairement wolof sur la rive droite du fleuve, tandis que la seconde est uniquement attestée parmi les communautés malinkés et sarakolés sur sa rive gauche. Cette délimitation coïncide par ailleurs avec les limites septentrionales du Royaume du Gabou au sud et, au nord, des frontières méridionales du Grand Djolof puis des petits royaumes issus de sa dislocation politique. Il s’agit ici d’une étape décisive, apportant un éclairage nouveau sur les dynamiques culturelles en Sénégambie au cours des Ier et IIe millénaires de notre ère.

Ces dynamiques culturelles s’observent également aux périodes les plus récentes, à l’échelle de quelques générations seulement. Sur la rive droite du fleuve Gambie, d’importants changements socio-économiques intervenus entre la fin du 19e siècle et du 20e siècle eurent ainsi un impact direct sur les modes de production et de consommation. Cette recherche contribue finalement, à travers ces mutations, à interroger le dynamisme de traditions céramiques souvent décrites comme “déclinantes“ ou “en voie de disparition“, et à questionner les processus à l’origine de tels phénomènes et à en décrire les rythmes. Certains marqueurs matériels pourraient témoigner de ces dynamiques et être identifiés en contexte archéologique.

 

Collaboration au Projet Falémé – Ethnoarchéologie des traditions céramiques du Sénégal oriental

Entre 2012 et 2015, quatre campagnes d’enquêtes ethnographiques sur les traditions céramiques de la vallée de la Falémé furent menées au Sénégal oriental par Anne Mayor (UniGe) et Ndèye Sokhna Guèye (IFAN-UCAD), dans le cadre du programme Peuplement Humain et Paléoenvironnement en Afrique – Projet Falémé. Les données issues de ces enquêtes ont été intégralement traitées et synthétisées, en collaboration directe avec A. Mayor.

Région de très forte diversité culturelle, la vallée de la Falémé offre un cas de très grande homogénéité technique du point de vue des traditions céramiques, s’exprimant notamment par le partage d’une seule technique de façonnage par l’ensemble des groupes culturels de la région : le moulage sur forme convexe. L’objet de cette recherche est donc d’interroger cette apparente homogénéité technique et de déceler à quel(s) niveau(x) de la chaîne opératoire l’identité des artisans est susceptible de s’exprimer. Une attention particulière est notamment donnée aux transformations les plus récentes des artisanats céramiques, avec par exemple d’importants phénomènes de remplacement des outils ou de certains composants de la recette de pâte. Ce travail est aussi l’occasion d’interroger les facteurs (environnementaux, culturels, socio-économiques) à l’origine de ces éléments de variabilité ou d’homogénéité techniques. L’un des principaux résultats de cette étude est de montrer que les traits techniques porteurs d’identité ne résident pas dans les modes de façonnage mais dans les procédures de cuisson et l’application, ou non, d’un traitement post-cuisson. L’extension géographique de ces traits techniques particuliers correspond à l’emprise d’anciennes royaumes médiévaux régionaux.

Ces enquêtes qui ont fait l’objet de plusieurs présentations dans des colloques internationaux et d’une publication sur les données archéométriques (Cantin et Mayor 2018 Journal of Archaeological Science), seront très prochainement publiées dans le Journal of Anthropological Archaeology (Delvoye et al. 2024).

BÉNIN

Collaboration au PROJET AFRICA – ARCHÉOMÉTALLURGIE DU FER : RESSOURCES, IDENTITÉS ET COMMERCE EN AFRIQUE (DIR. C. ROBION BRUNER, CNRS - FRANCE)

Initiée en 2023, ma participation au projet AFRICA s’intègre pleinement dans ma volonté d’élargir ma compréhension des traditions céramiques et des modes d’habitat aux sociétés ouest-africaines dans leur ensemble. Centré sur l’étude du rôle du fer dans les sociétés médiévales et modernes en Afrique de l’ouest, ce projet archéologique franco-bénino-togolais cherche aussi à documenter les modes de vie de anciens métallurgistes, et donc leurs habitats. L’une des zones d’étude du projet se situe dans le département de Couffo, dans le sud-ouest du Bénin, où des prospections intensives réalisées depuis 2021 ont révélé la présence de très importants amas de déchets métallurgiques et d’ateliers de production (Kpeta 1 et Dolomey). Or, une importante butte anthropique nommée Kpeta 2 a été identifiée à seulement 200m du site métallurgique de Kpeta 1. Sa surface est jonchée de très nombreux restes céramiques et lithiques (molettes et fragments de meules). En 2021, un premier sondage a permis de confirmer la présence de pavements en céramique, et révéla également une sépulture. Les datations radiocarbones alors effectuées sur charbons plaçait ces vestiges entre le début du 14e et du 17e siècles. Cette période est stratégique dans l’histoire des sociétés ouest-africaines puisqu’elle correspond à l’arrivée des premiers navigateurs européens à la fin du 15e siècle, marquant le début de la période dite “Atlantique“.

Ma collaboration au projet AFRICA se fait à la fois comme spécialiste de la céramique, mais aussi comme archéologue de terrain. Depuis août 2023, je suis ainsi en charge de la fouille de ce site d’habitat et de l’étude du mobilier céramique issu des recherches conduites dans cette région, et pour lequel un cadre typo-chronologique reste encore largement à construire.


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